samedi 23 novembre 2024

23 novembre 1883 : accident sur le lac Léman



Le soir du vendredi 23 novembre 1883, vers 18 heures, c’est un vrai temps d’automne qui règne sur le lac. Il pleut, le vent d’ouest est fort et soulève de vraies vagues, la visibilité réduite.

Le Rhône qui est parti de Genève à 14 heures vient de quitter Évian  à 17 heures 15 pour gagner Ouchy. Il est aux ordres du capitaine Lacombe. 

Simultanément, Cygne commandé par le capitaine Goop, quitte Ouchy en direction de Thonon, l’arrêt à Évian ayant été supprimé en raison des mauvaises conditions de navigation. Il n’emporte qu’une dizaine de passagers.

Les deux bateaux de la Compagnie générale de navigation font donc route l’un vers l’autre et doivent se battre contre les éléments. Sur les passerelles, les hommes guettent attentivement et les routes ne sont pas faciles à tenir.

À trois kilomètres d’Ouchy, les bateaux sont proches mais sont aux mains de marins expérimentés et le croisement devrait s’effectuer sans problème malgré ces mauvaises conditions. Mais soudainement, pour une raison inconnue, Cygne vire à gauche. La collision devient inévitable et la proue de Cygne éperonne le flanc gauche de Rhône. Le choc est brutal et le bruit intense fait sursauter tout les occupants. Beaucoup tombent. Une large brèche est ouverte è proximité de la salle des machines. L’eau s’y engouffre et noie tous les appareils. La lumière s’éteint aggravant panique et confusion. Pendant quelques minutes, les deux bateaux sont fixés l’un à l’autre. Jusqu’à ce que le Cygne fasse marche arrière pour se dégager. Ainsi faisant, il libère la brèche, permettant à  l’eau de pénétrer encore plus vite dan le vapeur. Tant que le Cygne était encastré dans le Rhône une vingtaine de passagers de ce dernier purent sauter sur le pont du premier mais c’est maintenant impossible. D’autant que la coque du Rhône s’enfonce de plus en plus rapidement par la proue. en quelques minutes, elle disparait complètement. À la passerelle du Cygne l’ordre est donné faire machine arrière et c’est dans ce sens de marche que le batesu rentra à Ouchy afin de ne pas embarque d’eau par son avant lui aussi ouvert à l’eau. Heureusement, une cloison étanche séparati la proue du salon de seconde classe. Il y parvint à 18 heures 15.

Sur les quais d’Ouchy, des Lausannois attendent les rescapés pour les emmener dans les salons des hôtels situés à proximité. À quelques mètres de là, on a allumé les feux à bord du Chillon. Il partira dès que possible vers minuit pour croiser sur le lieu présumé de l’accident. Malheureusement, sa quête de survivants fut infructueuse. Il étendit ses recherches le long de la côte suisse du lac, de Saint-Sulpice jusqu'à Villette.  C’est à proximité de cette dernière localité que son équipage retrouva quelques vestiges comme des bancs ou une marmotte de commis-voyageur, mais surout la casquette du pilote du «Rhône», M. Chappuis. 

Tôt le samedi matin, Le «Cygne», vidé de l'eau qui avait pénétré à l'avant, appareilla pour gagner les chantiers de réparations et de constructions de la Compagnie Générale de Navigation à Morges.

Immédiatement, une enquête fut ouverte par un juge, M. Bidlinmeyer. Le capitaine du Cygne, M. Gopp, fut arrêté le dimanche soir et incarcéré à la prison de l’Evêché. Le procès se tint quelques mois plus tard et le capitaine fut acquitté par le Tribunal fédéral, ses manœuvres ayant suivi les règlements de l'époque. 

La presse de l’époque rapporta les histoires de plusieurs voyageurs du Rhône qui parvinrent à échapper au naufrage mais le bilan officiel de l’accident dénombre 14 disparus parmi lesquels figurent le restaurateur du « Rhône », Jean Delarue, d'Hermance,  et son épouse. Il avait sauté sur le «Cygne» mais ne voyant pas sa femme, il l'appela. Elle ne parvenait pas à se sauver seule. M. Delarue se porta à son secours. Ils coulèrent ensemble. La mère et la soeur du capitaine Goop, qui commandait le Cygne avait embarqué à Évian et ne furent jamais retrouvées. Le capitaine du Rhône, M. Lacombe, fut entraîné par trois bateliers sur le Cygne malgré son désir de quitter son bateau le dernier.

Le rapport de l'exercice 1883, présenté par la Compagnie Générale de Navigation à ses actionnaires fait l’analyse suivante :  « Le mauvais temps a été le facteur principal dans les causes de la catastrophe. Mais nous devons signaler en outre comme cause indépendante des bateaux, l'absence d'un règlement général de navigation international ayant force de loi dans toutes les parties du lac, et prévoyant le mode de croisement dans tous les cas qui peuvent se présenter. Il y a eu un manque d'entente entre les deux bateaux et chacun croit pouvoir justifier dans une certaine mesure la marche qu'il a adoptée, chose qui ne serait pas possible avec un règlement plus complet».

L’accident eut un fort retentissement à l’époque qui aboutit à la création d’une société de sauvetage encore en activité de nos jours.

En 1982, l’épave du Rhône fut découverte à 300 mètres de fond par la société Sub-rec. Elle fit depuis l’objet de plusieurs plongées et reportages photo-cinématographiques visibles sur le site de la société.


Contact : archivesmaritimes(at)gmail.com

Aucun commentaire: