mardi 7 juillet 2009

Cap Arcona, Thielbek, Athen et Deutschland dans la plus grande tragédie maritime du monde

La plus grande catastrophe maritime mondiale est survenue le 3 mai 1945 dans la baie de Lübeck, sur la mer Baltique, et les navires concernés étaient Cap Arcona, Thielbek, Athen et Deutschland. Trois de ces navires furent bombardés et mitraillés par les chasseurs-bombardiers Hawker Typhoons de l'escadrille 263 de la Royal Air Force basée à Ahlhorn, de l'escadrille 197 basée à Celle et par ceux de l'escadrille 198 basée à Plantlünne. (source Alain Vancauwenberghe). Voir l'émission Les morts du dernier jour sur Planète Thalassa (19:55 - vendredi 10/07, jeudi 16/07, mercredi 22/07 et à 01:40 - samedi 18/07).
«Le convoi provenant du camp de Neuengamme arrive le 20 avril dans le port de Lübeck. Les détenus sont transférés dans les cales des cargos Athen (2 300) et Thielbeck (2 000). Ceux de l'Athen passent sur Cap-Arcona, un ancien paquebot, qui reçoit d’autres arrivages et finit par « héberger » 6 500 déportés gardés par 500 SS. Un quatrième navire, Deutschland, se trouve aussi dans la baie de Lübeck avec sa cargaison de détenus. Le 3 mai, Athen lève l’ancre et se dirige vers Neustadt. A 14 heures 30 une escadrille de chasseurs bombardiers de la RAF attaque les bateaux. En 30 minutes, le Thielbeck coule : seuls survivent 50 personnes. Puis c’est au tour du Deutschland. Aucun survivant. Le Cap-Arcona coule : 150 survivants. L’Athen échappe par miracle. Bilan total : 7 300 déportés disparus et 600 Allemands.


Qualifié de « roi de l’Atlantique Sud », Cap-Arcona (ci-dessus), un vapeur rapide d’une jauge de 27 571 tonneaux, était le vaisseau amiral de la flotte des transatlantiques de la HSDG (Hamburg-Südamerikanische Dampfschifffahrts-Gesellschaft) de Hambourg. Un paquebot de très grand luxe, élancé, à propulsion jumelée avec trois cheminées rouge et blanc. A l’intérieur, aucun détail n’avait été laissé au hasard : mobilier de très grande facture, suite royale, cabines victoriennes, jardin d’hiver, salle de sport, court de tennis... Un liner d’exception qui servit de décor, en 1942, à la version allemande d’un film sur le naufrage de Titanic.

Maquette de Cap Arcona (avant 1940) dans l'exposition du site commémoratif du camp de Neuengamme

Construit dans les chantiers navals Blohm und Voss de Hambourg, Cap-Arcona fut lancé le 14 mai 1927. Lors de ce voyage inaugural, toutes les grandes personnalités européennes étaient à bord. Côté français, on notait la présence de Pierre Clostermann, véritable légende de l’aviation mondiale. D’une longueur de 206 mètres, d’un tonnage de 27 500 tonnes et doté de cales profondes, il était considéré comme l’un des plus beaux navires de son temps. Son nom, Cap-Arcona, provient du kap Arkona sur l’île allemande de Rügen (Mecklembourg-Poméranie occidentale). Ce vapeur servit aussi bien à des croisières de luxe qu’à l’émigration, principalement vers l’Amérique du Sud. Le 3 décembre 1928, à Rio de Janeiro, un hydravion transportant l’élite intellectuelle brésilienne et chargé d’accueillir Santos-Dumont, qui était à bord, s’échoua près du navire. Pendant douze ans, Cap-Arcona avait enchaîné les croisières fabuleuses qui faisaient sa réputation. En 1933, il était l’orgueil du IIIe Reich, battant pavillon nazi sur tous les océans. Le 25 août 1939, il fut pourtant réquisitionné pour service de guerre. Après l’invasion de la Pologne, le vapeur fut accouplé au quai dans le port de Dantzig (Gdansk), en tant que logement flottant de la Kriegsmarine.

Cap Arcona, embrasé de la proue à la poupe, peu après l'attaque, le 3 mai 1945

Quatre ans après son naufrage, le cargo Thielbek, remis à flot et réparé, reprit du service sous le nom de Reinbek (ci-dessus). En 1961, la compagnie maritime Knöhr et Burchard vendit le Reinbek, qui navigua alors sous pavillon panaméen. En 1974, il fut démonté à Split, en Yougoslavie.

Athen est un cargo allemand de 1 936 tonneaux (comme Thielbek) requisitionné par la Kriegsmarine. Dans les derniers jours de la guerre, il transborda des déportés majoritairement juifs, essentiellement de Neuengamme, sur le Cap-Arcona que les Allemands voulaient faire couler afin d'exécuter les déportés. Le Cap-Arcona surpeuplé, Athen reçut 1998 déportés avant que l'aviation britannique n'attaque le groupe de navires. Mais le bateau ayant hissé le drapeau blanc, la Royal Air Force l'épargna.
L'Union soviétique s'empara du navire comme prise de guerre et le renomma Général-Brusilow. Le 27 mai 1947, il fut offert à la Pologne et rebaptisé Warynski, qui le fit naviguer entre Gdańsk et Buenos Aires. En 1973, il fut transformé en entrepôt flottant dans la ville de Stettin sous le code NP-ZPS 8.
Deutschland IV (1923) était un transatlantique de la compagnie Hapag. Il fut coulé durant le même raid aérien que le Cap-Arcona et le Thielbek, le 3 mai 1945

Lancé le 28 avril 1923, il effectua sa croisière inaugurale le 27 mars 1924, de Southampton à New York. Ce bateau eut des problèmes de tremblement dus à ces vibrations, il reçu le surnom de «Cocktail Shaker». Remotorisé en 1929 avec une vitesse de croisière réduite à 19 nœuds. En 1940, il devint un navire-logement pour la Kriegsmarine à Gotenhafen. En 1945, en sept passages, il transporta 70 000 réfugiés de l'Allemagne orientale vers l'Ouest. Il devint ensuite un navire-hôpital. Le 3 mai 1945, il fut brûlé puis coulé dans la baie de Lübeck au large de Neustadt par la même attaque aérienne britannique qui coula le Cap-Arcona et le Thielbek. Ces deux navires avaient été remplis de déportés de 24 nationalités différentes (dont des Français) pour être coulés. Des milliers d'entre eux sont morts. Au moment de l'incendie, aucun n'était à bord de Deutschland et l'équipage eut le temps de fuir. En 1948, il fut déséchoué et son épave démontée.

1 commentaire:

Marie de Bayonne fille d'une des victimes a dit…

Les archives britanniques pourront être consultées en 2045!!
Les rares survivants, les familles, ,les associations veulent connaître la vérité sur cette tragédie.
L'accès aux archives britanniques doit être rendu possible 67 ans après ce douloureux épisode pour les victimes et leurs familles