lundi 1 avril 2013

Les débuts difficiles des submersibles de la marine royale canadienne

 CC1 et CC2 ont été construits au Seattle Dry Dock and Construction company pour le compte de Electric Boat Company of Jersey. Destinés à la marine chilienne, Iquique (CC1) a été lancé le 3 juin 1913 et Antofogasta (CC2) le 31 décembre de la même année. Conçus pour un déplacement de 313 tonnes en surface (412 immergé), ils étaient larges de 4,57m. le premier faisait 43,9m et était doté de cinq tubes lance-torpilles, CC2 faisait 46,33m et avait six tubes. Les deux avaient un des tubes en poupe et aucun autre armement. Ils pouvaient faire 13 nœuds (10 sous l'eau). 
La marine chilienne, qui avait pourtant déjà réglé 714000 dollars, refusa les sous-marins qui ne correspondaient pas aux spécifications.



A l'approche de la guerre, Richard McBride, Premier ministre de Colombie britannique (la plus occidentale des provinces canadiennes) se préoccupa de la défense de Vancouver et Victoria qui n'avaient pour se défendre que leurs bateaux de pêche. Les mouvements de la puissante flotte allemande de l'escadre du Pacifique renforçèrent ses inquiétudes. D'autant que la Royal Navy avait concentré tous ses moyens sur l'Atlantique, laissant le soin à l'allié japonais de surveiller la côte ouest canadienne. Peu avant la déclaration de guerre, McBride prit la courageuse décision d'utiliser l'argent provincial pour acheter les sous-marins bloqués à Seattle qui coûtaient pourtant l'équivalent de deux budgets (1150000 dollars). Il y avait urgence car les USA n'entrant pas en guerre auraient dû mettre l'embargo sur les submersibles. Le 4 août 1914, la guerre est déclarée mais les négociations pour l'achat ne sont pas terminées. On arrive à un accord sur un paiement cash, le chèque attendant à la frontière. A dix heures du soir (la guerre dure déjà depuis huit heures), les sous-marins glissent dans l'océan au bénéfice de la nuit et de la brume… Toutes les précautions avaient été prises pour que l'opération se déroule dans la plus grande discrétion. Au large, ils sont rejoints par le vapeur Salvor à bord duquel se trouve un équipage canadien qualifié. Conséquence du secret, leur arrivée à Victoria se fit au son des sirènes d'alerte, les autorités portuaires croyant à une attaque. Ils eurent pourtant le réflexe de vérifier et les sous-marins arrivèrent à Esquimalt (au sud de l'île de Vancouver), leur port d'attache, après avoir violé la neutralité américaine. 
CC2 et CC1 en route pour la base d'Esquimalt.
Ci-dessous, CC1 sur un slip du chantier d'Esquimalt.
Les provinces canadiennes ne pouvant pas posséder de forces armées, le gouvernement fédéral d'Ottawa remboursent leur achat et le 7 août 1914, les sous-marins passent sous l'autorité de la Royal Canadian Navy. Suivant l'exemple d'une série RN C-class construite pour la marine royale australienne (RAN), ils sont appelés CC1 et CC2
Les deux sous-marins et leur navire d'assistance, le HMCS Shearwater, en rade de Vancouver.

L'Amirauté leur donne comme assistance le HMCS Shearwater, un vieux navire abandonné par les Britanniques quand ils avaient laissé la base d'Esquimalt. 


HMCS Rainbow surveillant le Komagata Maru en rade de Vancouver en juillet 1914 pour éviter le débarquement d'immigrés sikhs illégaux.
De 1914 à 1917, avec le vieux croiseur protégé HMCS Rainbow, ils furent les seuls navires à défendre la côte ouest du Canada avec la marine impériale du Japon. Niobe et Rainbow furent les premiers navires achetés par l'amirauté pour la Royal Canadian Navy. Les patrouilles le long de la côte de British Columbia continuèrent trois ans bien que les sous-marins aient manqué de tout, y compris de torpilles (!), et que le danger ait été écarté par la destruction du Dresden en mars 1915.

Les sous-marins en 1917.
HMCS Shearwater maquillé pour le grand périple vers Halifax.
L'amirauté décide alors de redéployer les sous-marins en mer Méditerranée. Le 21 juin 1917, ils partent pour Halifax (côte est) avec le HMCS Shearwater en assistance dans un voyage épique de 8000 miles. Ils seront les premiers navires de guerre britanniques à passer le tout nouveau canal de Panama. A leur arrivée, le 14 octobre 1917, les sous-marins n'étaient plus en état de tenter la traversée de l'Atlantique.
Après plusieurs passages en chantiers et avoir survécu à la "grande explosion d'Halifax" du 6 décembre – provoquée par l'explosion du cargo français Mont-Blanc, chargé de munitions, qui avait heurté le norvégien SS Imo, il y eut plus de 2000 morts – ils terminent leur vie comme navires d'assistance et d'entraînement au Cape Breton. Il semblerait qu'ils aient participer aux essais du premier sonar sous la supervision de Alexander Graham Bell. Il seront vendu pour démolition en 1920.

2 commentaires:

Alain a dit…

Bravo pour nous avoir présenté deux navires et une histoire peu connue.

Alain

Benoît DEHAINE a dit…

Oui merci pour cette belle page d'histoire maritime. Bravo.