vendredi 22 novembre 2013

Quand les navires de la Kriegsmarine traversaient le centre de la France

D’avril à juillet 1943, les habitants d'Avallon – à 400 kilomètres de la mer la plus proche! – voient passer dans les rues d’imposants convois transportant des péniches de débarquement et des dragueurs de mines allemands qui rejoignent la côte méditerranéenne.

                                  Une péniche de débarquement allemande dans le centre d'Avallon.
Dans l'impossibilité de faire passer ses péniches de débarquement et ses dragueurs de mines par le détroit de Gibraltar, tenus par les Alliés, La Kriegsmarine (marine de guerre allemande) décide de rejoindre la côte méditerranéenne par la voie terrestre. Partis du Havre, les navires sans signes militaires distinctifs remontent la Seine, puis l'Yonne jusqu'au port d'Auxerre. Là, ils sont tirés de l'eau et chargés sur d'énormes remorques. « Il fallait deux remorques avec six essieux chacune pour transporter une péniche de débarquement, les fameux MFP, le tout était tracté par trois tracteurs à l'avant et quatre à l'arrière. Les convois mesuraient 90 mètres de long. »

Une vedette allemande, lors de son passage sur la RN 6 près de Cussy-sur-Forge. Trois camions étaient nécessaires à l’avant et à l’arrière, pour véhiculer ces bateaux de 50 m de long et 7 m de large. Photo DR
D'avril à juillet 1943, les Avallonnais vont voir passer en centre-ville 58 bateaux. Les convois rejoignaient la RN6 à Avallon après avoir traversé Saint-Bris-le-Vineux, Nitry, Joux-la-Ville et Lucy-le-Bois. Dans le mois précédant le transport des navires de guerre jusqu'à Chalon-sur-Saône, près de 5000 personnes ont été réquisitionnées afin de détruire sur le parcours tout ce qui pouvait entraver le passage des imposants convois : arbres, poteaux, signalisation et maisons. « Début avril 1943, les maires des villages traversés sont prévenus par la préfecture des destructions programmées. Les habitants disposent de deux jours pour quitter les lieux. »
À Avallon, deux pompes à essence sont ainsi démolies à coups de pioche. Mais l'événement qui marque le plus les esprits est la destruction à l'explosif de la façade de l'hôtel L'Escargot, rue de Lyon, lors du passage du premier convoi. « L'organisation Todt, en charge des travaux préparatoires, n'avait pas pris en compte cet obstacle. Le convoi a été stoppé pendant trois heures, le temps que les déblais soient enlevés par la main-d'œuvre réquisitionnée sur place. »
À chaque passage, la foule se presse sur le bord de la route pour observer ces scènes insolites. Ils étaient autorisés à regarder, mais pas à prendre de photos.

Alain

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